Dans un arrêt en date du 9 mai 2018, la Cour de cassation a jugé que « l’action tendant à voir déclarer un droit prescrit ne constitue pas, par elle-même, la reconnaissance non équivoque de ce droit par le demandeur à cette action » (Com., 9 mai 2018, n°17-14568).
Les faits étaient les suivants :
Une personne physique s’est rendue caution d’un prêt bancaire consenti à une société par acte authentique en date du 1er juillet 1991.
La société, débitrice, a été mise en liquidation judiciaire ; la banque prêteuse a déclaré sa créance au titre du prêt. La procédure de liquidation judiciaire a été clôturée en 2007.
Le 25 novembre 2008, la caution a assigné la banque prêteuse aux fins de voir déclarer prescrites les obligations nées de l’acte de cautionnement : cette demande a été rejetée par un arrêt en date du 4 mai 2010.
Le 30 avril 2015, la banque prêteuse a fait délivrer à la caution un commandement de payer au titre du prêt ; la caution a alors assigné la banque en annulation dudit commandement de payer invoquant la prescription de l’action en paiement de la banque prêteuse.
La Cour d’appel saisie a fait droit aux demandes de la caution en déclarant prescrite l’action en paiement de la banque prêteuse et, en conséquence, a annulé le commandement de payer délivré.
La banque prêteuse s’est pourvue en cassation : selon elle, l’obligation ne pouvant s’éteindre que s’il est constant qu’elle existe, l’action intentée à l’initiative du débiteur (en l’espèce la caution) à l’encontre de la banque prêteuse visant à voir déclarer éteinte l’obligation née de l’acte de cautionnement, par un des modes d’extinction que prévoient les articles 1234 ancien et 1342 et suivants nouveaux du code civil, sans attendre que ladite banque prouve l’existence de son droit, emporte nécessairement reconnaissance, au sens de l’article 2240 du Code civil[1], de la matérialité et du principe de ladite obligation jusqu’à ce qu’il soit jugé qu’elle s’est en effet éteinte. Ainsi, à suivre la banque prêteuse, l’action de la caution intentée en 2008 avait emporté reconnaissance de sa dette et, dès lors, interrompu sa prescription.
La Cour de cassation rejette le pourvoi en affirmant que « l’action tendant à voir déclarer un droit prescrit ne constitue pas, par elle-même, la reconnaissance non équivoque de ce droit par le demandeur à cette action ».
Il en résulte que l’action intentée le 25 novembre 2008 par la caution et rejetée par arrêt en date du 4 mai 2010 n’a pas eu pour effet d’interrompre la prescription de son obligation, prescription acquise au jour où la banque prêteuse lui a fait délivrer un commandement de payer fondé sur ladite obligation, le 30 avril 2015.
[1] L’article 2240 du Code civil dispose que « La reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription. »